Publié le 19 nov. 2020 à 16:52
Après avoir fait décoller les livraisons de repas à domicile et les diverses plateformes de streaming, la crise sanitaire va-t-elle doper les ventes de voitures neuves en ligne ? Désormais courante sur le marché de l'occasion, la pratique reste marginale pour les modèles sortis d'usine, à l'exception notable de Tesla . Mais plusieurs constructeurs voient dans la période l'opportunité de développer de nouvelles pratiques, et vont même jusqu'à proposer des achats 100 % sur Internet.
PSA fait partie des entreprises les plus offensives sur ce créneau. Lors du premier confinement , le groupe avait accéléré le lancement en France d'une boutique Peugeot en ligne qui avait été rodée pendant un an dans le cadre des ventes au personnel. Depuis, plusieurs autres marques (Citroën, DS, Vauxhall…) ont suivi, en France ou en Angleterre. Objectif : séduire de nouveaux clients, avec de meilleures marges.
Chez PSA, une direction du e-commerce
« Au total, nous avons désormais une dizaine de marques pays sur lesquels on est capable de proposer la totalité du processus d'achat : configuration du véhicule, offre de financement, estimation ferme de la valeur de reprise, et même la livraison à domicile », avance Thierry Koskas, directeur ventes et marketing du groupe. Une direction du e-commerce a été créée, et confiée à un dirigeant venu de Veepee.com, l'ex-Ventes Privées.
Aujourd'hui, les volumes restent encore marginaux, si on les compare aux 3 millions de voitures écoulées par le groupe en Europe l'an dernier. « En comptant les ventes au personnel, nous en sommes environ à 4.000 voitures par mois, dont la moitié en France, précise le dirigeant. Mais nous en vendons chaque mois plus que le mois précédent. Le confinement est un accélérateur. Nous passons des paliers, que ce soit nous, qui avons beaucoup appris ces derniers mois, mais aussi les clients dans leur tête. » Thierry Koskas estime que les volumes réalisés en ligne dépasseront « assez vite » le seuil de 10 % des ventes.
Pour Porsche, la quête de nouveaux clients
Porsche partage la même approche. Après l'Allemagne, la marque permet depuis le début novembre à ses clients français de commander directement un modèle en ligne. Outre-Rhin, 57 % des acheteurs passés par ce canal sont de nouveaux clients, fait valoir la filiale du groupe Volkswagen. Le parcours n'est toutefois pas totalement dématérialisé : après le versement en ligne d'un dépôt de garantie, la conclusion du contrat doit se faire en centre Porsche, précise la firme, qui n'est pas encore prête à lâcher les clés d'un bolide valant couramment plus de 200.000 euros sans un contact de visu avec le client.
Même certains concessionnaires s'y mettent. Pendant le confinement, « les espaces de vente sont fermés mais notre site reste ouvert 24/7 », a annoncé il y a quelques jours dans un communiqué BYmycar, qui compte 89 concessions dans toute la France. Là encore, le processus d'achat peut être mené intégralement en ligne, jusqu'à la livraison à domicile. Et pour les clients qui auraient des remords, acheter sa voiture sur Internet « permet une durée de rétractation à 14 jours après la livraison du véhicule », rappelle le site.
Essayer (ou pas) le véhicule avant d'acheter
Ces ventes intégralement en ligne laissent toutefois de nombreux observateurs dubitatifs. On n'investit pas 20.000 euros (souvent plus) dans une voiture sans s'asseoir dedans pour éprouver la qualité des sièges ou de la suspension, estiment-ils. Premier distributeur automobile en France avec 250 points de ventes, le groupe Emil Frey vient de mettre son stock de véhicules neufs sur son site Autosphere.fr, mais le modèle sélectionné pourra être livré gratuitement à domicile (lorsque le confinement sera levé) pour un test avant l'achat.
« Nous estimons que c'est une étape nécessaire, plaide Hervé Miralles, son directeur général France. Une voiture embarque de plus en plus de technologies, il faut pouvoir les essayer, s'assurer des sensations au volant… Cela rassure le client, et c'est également un moment de plaisir dont il ne faut pas le priver. »
Le marché pas encore mûr
Plus largement, les acheteurs de voitures neuves, avec un âge moyen de 56 ans, n'ont ni les mêmes comportements ni les mêmes attentes que les Millennials. Selon une étude du cabinet ICDP publiée le mois dernier par le Conseil national des professions de l'automobile (CNPA), « 86 % des acheteurs pensent que le contact humain en concession est 'important, voire très important'. Ils visitent en moyenne 4 concessions avant de se décider, et 72 % réalisent un essai.
Le reconfinement ne semble pas avoir fait bouger les lignes, malgré les encouragements gouvernementaux à pratiquer le « click and collect ». « Depuis début novembre, les commandes sont à l'arrêt, rapporte par exemple Hervé Miralles. Les clients se renseignent, mais ils n'achètent pas. Ils attendent la réouverture des concessions pour le faire. » Responsable de la branche concession au CNPA, Christophe Maurel confirme : « Les sites des distributeurs et des constructeurs enregistrent une activité plutôt dynamique, mais les transactions ne se font pas. Le recul est de -70 à -80 % par rapport à l'an dernier », dit-il.
Inquiétude chez les concessionnaires
Si la crise sanitaire a accéléré les initiatives de ventes de véhicules neufs 100 % en ligne, elle démontre également que le marché n'est pas encore mûr. Au grand soulagement des concessionnaires, qui se préparent à cette évolution en digitalisant des pans entiers de leur activité (prise de rendez-vous, chat avec les clients…) tout en redoutant que les constructeurs ne tentent un jour de les marginaliser. Selon un expert au fait du dossier, c'est d'ailleurs pour ne pas risquer un conflit avec son réseau que Renault refuse ostensiblement de suivre l'exemple de PSA.
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