Il n’y a pas vraiment de quoi pavoiser. Certes atypique en raison de la crise du Covid qui perdure, l’année écoulée situe clairement un retournement du marché et des actes d’achat. Alors que la règle vérifiée depuis des années est d’une vente de voiture neuve pour 2,5 d’occasion, le ratio est passé l’an dernier à 1 pour 4. Ou presque. Les voitures neuves ont en effet représenté 21,47 % des immatriculations et les occasions 78,53 % des 7,7 millions enregistrées en préfectures. Et la tendance en faveur des secondes s’accentue, car si la croissance du neuf a stagné à + 0,54 % par rapport à 2020, année déjà sinistrée, celle des occasions a bondi de 7,88 %.
Mais le gouffre est encore plus profond que les chiffres ne le disent, car les particuliers ne représentent plus que 43 % des acheteurs du neuf, l’essentiel des transactions étant effectué auprès des sociétés, de la location courte durée et des garages eux-mêmes avec leurs véhicules de démonstration. Certes, ces derniers viendront gonfler ensuite les rangs des occasions récentes, celles qui servent à absorber l’importante décote de la première année (de 25 à 30 %). Mais le fait que seulement 720 000 Français ont acheté une voiture neuve à titre personnel en 2021 demeure. Soit moins d’un achat sur dix pour un Français cherchant à se motoriser.
L’occasion comme recours
« Passé à côté de la reprise, pour la seconde année consécutive, le volume des marchés automobiles s’est situé en 2021 au niveau de 1975 », explique Éric Champarnaud, président d’Autoways, un cabinet d’analyse et d’anticipation stratégique pour les métiers de l’automobile, qui publie ces statistiques. « En 2021, les problèmes d’approvisionnement en puces électroniques, dont les capacités de production sont mises à mal par la crise sanitaire, persisteront. D’autre part, une normalisation sous forme de ralentissement de la croissance économique va survenir. Aussi, une récupération rapide et puissante des marchés ne représente pas le scénario principal pour 2022. »
Un avis que beaucoup de professionnels partagent mais qui cache en partie les raisons structurelles de cette désaffection pour le neuf. Il y a bien évidemment un problème de capacité financière qui fait se diriger un nombre grandissant de consommateurs vers la LOA (location avec option d’achat) en neuf et vers l’occasion. Mais ce qui pose question, ce sont ces trois catégories égales qui représentent chacune 22 % des 6 millions de transactions en voitures d’occasion.
Passe pour la tranche des véhicules de 2 à 5 ans, c’est a priori le gros de la troupe mais on l’attendait plus fournie que cela. Elle fait tout juste jeu égal (voir tableau) avec la catégorie des 10 à 15 ans et celle des plus de 15 ans, chacune représentant environ 1,34 million de véhicules. On en déduit ainsi que près de 2,7 millions de véhicules d’occasion ont plus de 10 ans. Ils ont néanmoins satisfait aux règles du contrôle technique dont on mesure ici toute l’importance. Cela provoque une pénurie latente de voitures d’occasion à vendre et les propositions de reprise dans des conditions avantageuses se multiplient sur les réseaux et chez les concessionnaires, en rupture de stocks V.0.
Chasse aux sorcières diesels
Car ces véhicules anciens continuent de rendre des services équivalents à vil prix aux Français, même si beaucoup d’entre eux seront frappés par les restrictions d’accès aux zones à faibles émissions (ZFE). Et cela bien que le Grand Paris a reculé d’au moins un an à courant 2023 son application. Mais c’est à une chasse aux sorcières diesels que l’on assiste et qui englobera à terme toutes les générations de cette technologie.
Le projet d’étendre aux vignettes Crit’Air 2, soit à tous les diesels même les plus récents, l’interdiction d’accès (hors week-ends) du Grand Paris reste au programme pour 2024, Grenoble enchaînant en juillet 2025 et Lyon en 2026. De quoi perturber les stratégies d’achat en neuf pour des Français qui, il y a peu et poussés par l’action gouvernementale, plébiscitaient encore le moteur à gazole. Cette loi, outre qu’elle pousse à une reconversion industrielle dramatique, vide les concessions et met en péril toute une profession de commerciaux dont la rétribution est majoritairement attachée aux primes de résultats.
Faute de savoir à quoi s’en tenir, l’occasion constitue pour les acheteurs une solution d’attente prudente, avec un moteur essence de préférence si le véhicule est récent. En milieu rural et avec des véhicules plus anciens, la carte diesel peut être encore jouée sachant que les ZFE seront encore accessibles du vendredi à 20 heures au lundi à 8 heures. Conçue avant tout pour le travail, la voiture diesel sera donc, selon ce règlement paradoxal, ravalée dans les métropoles au rang temporaire de voitures de loisirs.
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