La conversion au tout-électrique à partir de 2035 est-elle inéluctable pour l'industrie automobile européenne ? Alors que les discussions sur ce sujet doivent aboutir dans les mois à venir, le gouvernement et la Plateforme automobile (PFA), le lobby français du secteur, veulent garder le jeu ouvert, plaidant pour que cette décision ne soit pas actée cette année mais en 2028. La probabilité qu'ils obtiennent gain de cause paraît toutefois assez faible.
La trajectoire proposée depuis juillet dernier par Bruxelles passe par une réduction en 2030 de 55 % des émissions de CO2 des voitures neuves par rapport à leur niveau de 2021. La Commission propose ensuite que seuls les véhicules ne rejetant pas du tout de CO2 soient autorisés à la vente à partir de 2035. Ce qui revient, concrètement, à bannir à cette date les moteurs thermiques.
L'échéance de 2030 ne soulève pas beaucoup de débats. Mais le passage au tout-électrique cinq ans plus tard suscite l'opposition de plusieurs pays, dont la France. Le gouvernement dénonce un calendrier jugé trop serré pour permettre à la filière d'amortir les dizaines de milliers de suppressions d'emploi provoquées par ce choc technologique.
« Une folie »
Bruno Le Maire l'a redit la semaine dernière, en présentant les propositions de campagne du président-candidat pour l'automobile : basculer dans le tout- électrique est selon lui « une folie », alors que « l'hybride et l'hybride rechargeable restent des options tout à fait pertinentes ».
Pour arracher un sursis au moteur thermique, la France propose désormais « une clause de revoyure », a précisé le ministre de l'Economie. Concrètement, il s'agit de repousser la prise de décision à 2028. Une position sur laquelle se retrouve pleinement la PFA.
« Nous ne remettons pas du tout en cause le cap fixé par la Commission, précise Marc Mortureux, son directeur général. Mais il nous paraît très risqué d'écarter dès maintenant toute autre option que le 100 % électrique en 2035, sans être sûrs que toutes les conditions requises seront réunies. Le réseau de recharge va-t-il continuer à grandir à la mesure des besoins ? Et l'Europe sera-t-elle capable de produire assez d'électricité décarbonée ? Donnons-nous quelques années pour nous assurer que ce sera le cas. »
L'Allemagne dans le camp de la Commission
Cette position « pragmatique » aura toutefois du mal à s'imposer dans la négociation. Certains pays comme la Belgique ou les Pays-Bas veulent bannir le moteur thermique dès 2030. Surtout, l'Allemagne, sans qui rien ne se fait dans l'Europe de la voiture, semble s'être ralliée après bien des hésitations à la date de 2035. La coalition en place à Berlin soutient les propositions de la Commission « sur tous les sujets », a déclaré la ministre de l'Environnement, Steffi Lemke, la semaine dernière.
Autre complication : loin de considérer l'échéance de 2035 comme trop rapide, une majorité de marques ont déjà annoncé qu'elles ne vendraient plus que des voitures électriques en Europe dès 2030. Renault , Peugeot, Citroën, Fiat ou encore Volvo sont dans ce cas.
« Les constructeurs sont contraints à ce type de position pour montrer qu'ils ne sont pas largués par Tesla, sous peine de se faire massacrer en Bourse. Mais l'attention qu'ils mettent à la norme Euro 7 [la future norme pour les moteurs thermiques, en cours d'arbitrage, NDLR], montre que l'histoire n'est pas encore écrite selon eux », veut croire un protagoniste du dossier.
En s'accommodant publiquement des échéances souhaitées par Bruxelles, les industriels compliquent tout de même la tâche de ceux qui veulent détendre le calendrier. Seul le patron de Stellantis, Carlos Tavares, critique vertement les positions de la Commission. Mais son groupe n'en sera pas moins 100 % électrique dès 2030. Au sein de la filière, les acteurs plus à risque avec l'électrification sont les équipementiers et les sous-traitants. Mais ce ne sont pas les plus visibles.
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