
En annonçant il y a quelques jours son implantation prochaine à Dunkerque, le taïwanais ProLogium est venu renforcer un pôle de production de batteries pour voitures électriques qui comptera également ACC à Douvrin, AESC Envision à Douai, et Verkor (également à Dunkerque). Les quatre entreprises partagent toutefois une préoccupation commune : elles ne sont toujours pas fixées sur un paramètre déterminant pour leur compétitivité, le prix auquel leur sera facturée l'électricité à partir de 2026.
L'Arenh, le mécanisme qui régule le prix de vente des électrons issu du nucléaire, doit en effet s'éteindre fin 2025. Le nouveau système, toujours en discussion, doit recevoir l'approbation de la commission européenne, et certains industriels redoutent qu'ils se traduisent par une hausse des tarifs. « L'énergie, c'est ultra-stratégique, c'est un paramètre vital », martèle un dirigeant d'ACC.
Chez AESC, une deuxième tranche en attente
Chez AESC, cette incertitude retarde, selon nos informations, des décisions d'investissement. L'entreprise sino-japonaise a signé avec Renault il y a deux ans un contrat portant sur une capacité de production annuelle de 9 GWh en batteries. Mais AESC a dit dès l'origine qu'il pourrait monter à 31,5 GWh si un ou des clients le demandaient.
Aujourd'hui, les besoins sont là. Principale usine du pôle ElectriCity de Renault, Douai doit produire dans les années à venir la future R5, mais aussi la sportive A290 d'Alpine, le nouveau Scenic électrique, ou encore la remplaçante de la Micra pour Nissan. Soit, au total, une production supérieure à 480.000 véhicules par an à partir de 2025, pronostiquait le Losange l'an dernier.
Mais à ce stade, Renault et son fournisseur n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur le prix des batteries issues de cette deuxième tranche. Faute de savoir ce qui remplacera l'Arenh, AESC se base sur les anticipations de prix du marché pour l'après-2025, « et demande des hausses de prix substantielles à Renault », indique une source. Le Losange refuse : pour la future R5, premier véhicule qui sera équipé par AESC, la sensibilité au prix sera déterminante.
« La solution, ce serait que Renault accepte une indexation du prix des batteries sur ceux de l'électricité, poursuit la source. Mais le constructeur refuse cette solution ». Le constructeur explorerait même d'autres solutions d'approvisionnement, croit savoir un expert du secteur.
Cérémonie déprogrammée
Initialement, la cérémonie de pose de la première pierre de la gigafactory était prévue pour le 16 mai. Elle a été reportée, « en partie pour des raisons d'agenda », indique un cadre. Mais aussi, rapporte un autre, parce qu'AESC comptait profiter de l'occasion pour annoncer le lancement d'une deuxième tranche, ce qui n'est pas possible à ce stade faute d'accord sur le prix.
Contacté, Renault n'a pas souhaité faire de commentaires. « Les discussions se poursuivent », indique sobrement de son côté AESC.
L'après-Arenh préoccupe également les autres fabricants de batterie. Tous les témoignages convergent. Une gigafactory comme celle d'ACC (dont sont actionnaires Stellantis, Mercedes et TotalEnergies via sa filiale Saft) engloutira la consommation énergétique d'une ville de 350.000 habitants.
Les acteurs du secteur négocient actuellement l'avenir des contrats d'approvisionnement électrique de l'industrie. Tout en ayant conscience, comme le glisse l'un d'eux, que « les contraintes européennes sont fortes », Bruxelles voyant d'un mauvais oeil la vente au rabais de l'électricité du nucléaire existant.
« Nous n'avons pas de doute que nous serons compétitifs avec une hypothèse d'un mégawattheure à 50 euros (aujourd'hui, l'Arenh est fixée à 42 euros), ce qui représente environ 5 % de nos coûts, témoigne un acteur de la batterie. Si nous devions multiplier par deux ce prix, cela induirait une hausse de 5 % de nos coûts et la transition énergétique en serait ralentie. »
« Il en va de la compétitivité du site France »
« Il faudra trouver un autre mécanisme pour conserver un accès à une énergie compétitive, martèle-t-on chez ACC. Il en va de la compétitivité du site France. C'est un facteur clé de la performance et de la profitabilité future. »
L'énergie française est certes décarbonée grâce au nucléaire. Mais si elle coûte plus cher qu'ailleurs, voilà qui pose problème. Certains lorgnent ainsi sur l'Espagne, champion en pleine croissance des énergies renouvelables très bon marché et grand producteur automobile.
Utiliser la « chaleur fatale »
Heureusement, Dunkerque présente des avantages uniques en termes énergétiques. « Nous avons choisi notre site car nous pourrons utiliser la chaleur fatale produite par des industriels voisins, ce qui viendra diminuer notre facture énergétique », explique Vincent Lemaignan, PDG et co-fondateur de Verkor.
La ville industrielle du Nord a d'ailleurs lancé un projet « d'autoroute de la chaleur », reliant industriels et logisticiens de la zone industrialo-portuaire, qui devrait sortir de terre à horizon 2025. Elle ferait transiter l'équivalent 635 gigawattheures, soit l'équivalent (sous forme de chaleur et non d'électrons) d'un quart de la production du futur parc éolien offshore d'EDF au large de Dunkerque.
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