
Et si la solution se trouvait tout simplement dans votre réservoir ? Conducteur de voiture à essence, tout n'est pas perdu pour vous. Vous avez sans doute remarqué, lors de vos passages à la pompe, ce carburant délivré par un pistolet bleu nommé E85. C'est surtout son tarif qui attire l'attention à environ 1 €. Là où le prix du litre d'essence ou de gazole atteint souvent près du double, voire plus lorsqu'il n'est pas plafonné comme c'est le cas actuellement chez Total.
Même si, au fil du temps, le prix de l'essence fait le yoyo selon le prix du baril de pétrole et les aides à la consommation accordées par le gouvernement, l'avantage du superéthanol par rapport au sans-plomb 95 s'établit encore à environ 80 centimes le litre selon le site carburants.org . Il a atteint, il y a plus d'un an, l'écart de 1,20 € ce qui en augmentait encore l'intérêt. Pourquoi cette hausse des tarifs ? Tout simplement parce que les autres éléments servant à produire ce bioéthanol comme le maïs, le blé et le gaz qui intervient dans la distillation ont drastiquement augmenté avec la crise en Ukraine.
Mais ce carburant reste très attrayant sur le plan environnemental, car, à base d'alcool distillé, il émet beaucoup moins de gaz à effet de serre (70 % en moins) par rapport à l'essence, réduit les particules fines de 90 % et les oxydes d'azote de 30 %. On considère même qu'un véhicule équipé permettrait d'économiser 1 620 kg de CO2 par an comparé à ses émissions lorsqu'il fonctionnait à l'essence. Et cela malgré ses inconvénients car s'il consomme nettement plus avec le superéthanol, de l'ordre de 20 à 25 % tout de même, un moteur à essence converti parvient à ce petit miracle qui consiste à faire le plein avec un billet de 50 €.
Nous avons tenté l'expérience en convertissant une Seat Leon 1.2 TSI de 2014, forte de 80 000 km, avec un boîtier Flexfuel normalement facturé 1 150 € installé sur ce modèle. Voilà en 10 points notre retour d'expérience après 10 000 kilomètres parcourus.
1- Être éligible pour transformer. Toutes les voitures thermiques ne peuvent être modifiées, les diesels tout d'abord, mais aussi les véhicules relativement anciens dont les sièges de soupapes ne sont pas adaptés. Mais il en reste très peu en circulation et, pour être sûr de l'éligibilité de votre véhicule, il suffit de le vérifier auprès d'un installateur ou sur le site du bioéthanol.
2- Un budget de 800 à 1 600 €. Il faut compter à peu près une journée pour adapter le moteur avec un nouveau boîtier d'allumage spécifique, car le mélange air essence est modifié. C'est la raison pour laquelle il faut éviter les transformations non officielles, beaucoup moins chères, mais qui mettent en danger la longévité du moteur et, s'il en bénéficie encore, la garantie. En revanche, une adaptation légale conserve la garantie constructeur et, pour l'extension boîtier E85, c'est celle du fabricant du kit qui s'applique.
3- Une aide de 50 % plafonnée à 500 €. Un certain nombre de régions ayant pris en compte l'impact écologique de cette transformation, aident les propriétaires avec une prime représentant jusqu'à 500 € du coût de la modification comme la Région Sud, exemplaire sur ce plan. On peut dès lors tabler sur un amortissement de la part revenant à l'usager après 12 000 à 15 000 km parcourus.
4- Quel boîtier homologué ? Biomotors, Borel, eFlexfuel et Flexfuel proposent des boîtiers E85 pour de nombreux modèles existants et même pour de gros moteurs dépassant les 15 chevaux fiscaux. Dans notre cas, nous avons retenu Flexfuel qui est monté par le réseau Midas et Norauto, mais de nombreux garages dont on trouvera les coordonnées ici. le font également.
5- Adaptation en deux temps. Alors que l'on nous vantait les mérites de la dernière génération de boîtier Flexfuel au dosage beaucoup plus fin grâce à l'intelligence artificielle, l'adaptation sur le moteur d'origine Volkswagen fait manifestement tousser celui-ci. Devant l'irrégularité de fonctionnement, l'installateur avec le réseau du fabricant décidera de revenir à un boîtier de technologie précédente, ce qui apparaît frustrant, mais réglera les trous en reprises.
6- Un résultat étonnant. La sensation de conduite change à peine, mais c'est en mieux, avec une douceur et une progressivité augmentées, sans doute dues au taux d'octane de 104, plus élevé que le 95 et le 98 de l'essence. Autant dire qu'il convient parfaitement aux mécaniques affûtées. Plus de trou à l'accélération avec l'ancien boîtier, il reste toutefois un vrai tracas : étalonner la jauge de carburant. Elle va se révéler fausse en raison d'une densité différente du carburant qui nécessiterait un nouveau tarage du calculateur. Il ne faut donc plus se fier au témoin de réserve, car celui-ci allumé, il faut s'empresser de faire le plein sans compter sur les 50/70 km habituels de réserve.
7- Une consommation en hausse raisonnable. Annoncée entre 20 et 25 %, notre consommation moyenne après 10 000 km parcourus ressort à 7,5 l au lieu de 6,5 l auparavant. Cela représente une hausse de 15,4 %, bien inférieure aux estimations. De ce fait, elle permet de rentabiliser beaucoup plus vite l'investissement initial de 1 150 €, ramené à 650 euros, prime de la Région Sud déduite.
8- Une aide précieuse de la Région Sud. Le dossier d'aide mise en place par la région n'est pas une mince affaire à remplir. Beaucoup de détails sont à fournir pour décrocher la prime représentant 50 % du montage à concurrence de 500 €. La communication avec la région est assez erratique, mais nous aurons finalement le remboursement de l'installation après 6 mois d'attente. Reste aux autres régions à suivre l'exemple, ce qui est loin d'être le cas. À vérifier sur le site du Bioéthanol.
9- Une nouvelle virginité en suspens. Les excellentes performances en matière d'émissions polluantes permettent de classer les véhicules neufs compatibles E85 avec une vignette Crit'air 1. En revanche, et c'est un paradoxe, voire une injustice, une voiture transformée conserve au niveau national la vignette Crit'air originelle. C'est donc à non-sens et une discrimination absurde entre véhicule neuf et d'occasion alors que l'enjeu environnemental de la conversion vise justement à rendre un véhicule plus propre qu'il ne l'était auparavant.
Alors que l'E85 constitue une solution très attrayante et simple pour tous les possesseurs de voiture à essence qui se croyaient condamnés par les ZFE (zones à faibles émissions des centres-villes), il convient de régler cette injustice. Des villes accordent déjà, au niveau régional, des autorisations d'accès comme le Grand Reims. Montpellier fait de même en limitant cela, on ne sait trop pourquoi, aux véhicules Crit'Air 2 et 3. Pourtant, une voiture officiellement transformée est homologuée et reçoit une plaque d'identification sur le châssis. Le propriétaire doit également procéder à la modification (gratuite ou presque) de la carte grise qui prendra en compte les nouvelles performances écologiques.
10- Une flexibilité totale. Comparé au GPL qui est un peu moins cher, le E85 est plus adaptable puisqu'il ne nécessite pas l'installation d'un second réservoir. De plus, le moteur consomme tous les types d'essence indifféremment ce qui fait que, si le bioéthanol n'était pas disponible à la pompe, on pourra le remplacer par du Super 95 ou 98. Un cas assez improbable puisque désormais plus de 3 500 stations-service (39 %) le distribuent en France. Ce n'est pas le cas dans le reste de l'Europe qui n'a pas souscrit de la même manière à l'intérêt de l'E 85 alors qu'il constitue le premier carburant au Brésil.
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