
À quelques mois des futures élections européennes, l'association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA) a présenté un manifeste sur la situation de l'industrie automobile destiné aux futurs membres des institutions européennes. Si le lobby de l'industrie automobile rappelle être en faveur de la décarbonation de son secteur, assurant au passage engager 250 milliards dans la transition, il invite « l'Europe à adopter d'urgence une approche globale des défis de l'industrie automobile. [...] Si vous regardez nos concurrents mondiaux, vous verrez qu'ils sont très bons dans ce domaine ».
Pour le prochain mandat européen, entre 2024 et 2029, l'ACEA menée par Luca de Meo, le directeur général de Renault, a relevé cinq recommandations politiques pour aider l'industrie automobile européenne. Dans les grandes lignes, elle demande notamment une stratégie européenne commune à toutes les étapes du cycle de vie d'un véhicule, « de la mine à la tombe », comme aime le répéter Luca de Meo. Pour rappel, l'Union européenne a acté la fin de la vente des moteurs thermiques pour 2035, forçant ainsi l'industrie automobile à accélérer sur de nouvelles technologies, en particulier l'électrique. L'ACEA rappelle à l'Europe que l'industrie automobile rassemble 13 millions d'emplois et rapporte 390 milliards d'euros d'aides publiques.
Moins de réglementations
Pour faire face à la compétitivité grandissante de la Chine, l'ACEA réclame une diminution importante des réglementations ainsi qu'une cohérence. « Notre industrie a en moyenne huit ou neuf régulations par an jusqu'en 2030, dont certaines sont contradictoires, a déclaré Luca de Meo devant la presse, affirmant avoir augmenté de 25 % le nombre d'ingénieurs juste pour ces régulations ». Selon lui, les réglementations augmentent le poids et le prix des véhicules électriques européens, ce qui freine la transition.
Le dirigeant réclame davantage de dialogues entre les décideurs politiques et les industriels : « Les Etats-Unis stimulent, la Chine ordonne et l'Europe régule ». L'ACEA demande à repenser le cadre réglementaire en planifiant à long terme, réglementant plus raisonnablement et proposant des alternatives viables en cas de « stratégie de sortie ». Surtout, les constructeurs européens rappellent leur volonté d'une neutralité technologique de l'Europe pour atteindre les objectifs de réduction des émissions carbone.
Pas de protectionnisme
En outre, l'ACEA estime que la diminution de la réglementation augmentera la compétitivité européenne. Ces derniers temps, l'Europe se trouve entre l'IRA américain qui incite les constructeurs, en particulier asiatiques, à construire leurs usines de batteries ou de voitures électriques sur leur territoire et la Chine qui possède un écosystème électrique depuis plus de 20 ans. Ces derniers mois, la Commission européenne a d'ailleurs lancé une enquête sur de potentielles aides publiques illégales de la part de Pékin à son industrie automobile, assurant des sanctions si les conclusions s'avèrent positives.
Mais Luca de Meo et l'ACEA se montrent plus prudents. Dans leur manifeste, les constructeurs européens appellent à « garantir des conditions de concurrence équitables pour les véhicules européens fabriqués de manière durable en défendant des règles commerciales équitables et libres et en garantissant l'accès aux approvisionnements essentiels », assurant qu'il faut « faire de l'Europe un lieu de production et de travail attrayant ».
Mais le directeur général de Renault n'est pas en faveur de mesures protectionnistes, répliquant qu'elles sont « inefficaces et inflationnistes » sur le long terme. Il en appelle plutôt à plus de coopération entre tous les acteurs de l'automobile, afin de réduire les coûts de production. « Nous visons 40 % de réduction du prix des voitures d'ici 2027-2028 », a-t-il affirmé.
Le modèle intéressant des Kei cars
Plutôt que de fermer les frontières, Luca de Meo invite plutôt à des développer d'autres modèles. Il cite l'exemple de Kei cars, ces petites voitures en vogue au Japon. Les Kei cars représentent désormais 40 % du marché automobile japonais, bénéficiant d'une taxe allégée et, surtout, il n'est pas nécessaire de disposer d'une place de parking pour les posséder, contrairement au reste des véhicules vendus au Japon. Etant équipées de petites batteries avec peu d'autonomie, elles peuvent coûter moins de 10.000 euros si l'on déduit toutes les aides. C'est quasiment deux fois moins qu'une Dacia Spring, la voiture électrique la moins chère du marché en Europe à l'heure actuelle.
Surtout, Luca de Meo a rappelé l'importance du développement des infrastructures de recharge, « 7 à 10 fois plus rapidement que ce qui est fait à l'heure actuelle » pour couvrir la demande, ainsi que le maintien des aides à l'achat. « Le marché de l'électrique n'est pas naturel, il faut l'aider. Dans tous les pays où les aides ont diminué, la demande a chuté. »
Les derniers chiffres donnés par l'ACEA lors de la conférence anticipent une plus lente progression de l'électrique en Europe l'année prochaine, de 2,5 % en 2024 contre 12 % attendus cette année. « La part de marché de l'électrique est de 14,5 % cette année et elle tournera autour de 20 % l'année prochaine avec 10.7 millions de voitures électriques prévues pour 2024. »
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