La reprise de l'automobile freinée par la pénurie de puces - Electronique - L'Usine Nouvelle

La conjoncture dans automobile affiche une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle c’est que cette industrie, dont la crise du Covid-19 a fait plonger les ventes au premier semestre 2020, a commencé à remonter la pente au troisième trimestre 2020 dans certaines régions du monde. Depuis, le redressement semble se généraliser et s’accélérer plus rapidement que prévu. Et cela se ressent dans le chiffre d’affaires 2020 supérieur à toutes les attentes de STMicroelectronics, l’un des cinq plus gros fournisseurs de puces pour ce secteur.

La production de voitures ralentie en Chine

La mauvaise nouvelle c’est que cette reprise est freinée par la pénurie de puces électroniques dédiées, composants aujourd’hui essentiels aux voitures traditionnelles à moteur thermique et encore plus aux véhicules électriques et hybrides.

Avec pour conséquence, un allongement des délais de livraison et une flambée des prix, selon Brady Wang, analyste au cabinet Counterpoint.

" L'impact du Covid-19 sur la chaîne d'approvisionnement des semi-conducteurs s'est étendu de l'électronique grand public à l'électronique automobile, écrit-t-il sur le blog de Counterpoint. Depuis le deuxième trimestre 2020, de nombreux fournisseurs d'électronique automobile, tels que NXP, Renesas et Microchip, ont annoncé des augmentations de prix pour certains composants clés. Certains constructeurs automobiles chinois ont même ralenti leurs ventes de voitures en raison d'un approvisionnement insuffisant de ces composants au quatrième trimestre 2020. "

La pandémie actuelle a bouleversé la chaîne d’approvisionnement et modifié l’allocation des capacités de production de puces en faveur de secteurs en croissance comme la 5G, les PC, les téléviseurs ou l’intelligence artificielle. Elle a dans le même temps accéléré le mouvement de digitalisation et d’électrification de l'automobile, modifiant la demande de composants électroniques dans ce secteur. Les fournisseurs de semi-conducteurs se sont retrouvés avec de grandes capacités de production inutilisées et ont dû, pour répondre à la nouvelle demande, accroitre la sous-traitance de la fabrication auprès de fondeurs de puces comme TSMC, Samsung, UMC ou GlobalFoundries. "L'expansion limitée au cours des dernières années de la capacité de production sur des plaquettes de 200 mm, utilisées pour la plupart des puces automobiles, a intensifié la pénurie, constate Brady Wang. À court terme, cela a conduit à des augmentations des prix. À long terme, cela transformera l'écosystème mondial de l'électronique automobile. "

L'auto, cible privilégiée des fabricants de puces

L'électronique automobile se distingue par un processus de qualification rigide, compliqué et long, mais offre l’avantage d’un marché plus stable, de marges bénéficiaires plus élevées et de cycle de vie de produits plus long que dans les smartphones, les PC ou l’électronique grand public. C’est pourquoi elle est la cible privilégiée de la plupart des fournisseurs de semi-conducteurs. Elle constitue d'ailleurs le premier débouché pour Infineon Technologies, NXP, Renesas Electronics, Texas Instruments ou encore STMicroelectronics.

Selon Brady Wang, la plupart de ces fabricants intégrés (par opposition aux sociétés fabless qui ne possèdent pas d’usines) n'ont pas mis en place de nouvelles usines au cours des trois dernières années et continuent d'augmenter la proportion de fabrication externalisée auprès de fondeurs de puces pour réduire les risques industriels et financiers. "Par exemple, Infineon a décidé d'augmenter la part de la production sous-traitée à 70% pour les circuits logiques et à 25% pour les composants électroniques de puissance, indique-t-il. Renesas réduit sa capacité de fabrication depuis 2011 en faveur d'un accroissement de la sous-traitance auprès de TSMC pour épouser le modèle industriel léger, fab-lite. "

Migration de la production vers les plaquettes de 300 mm

Les cinq premiers fournisseurs de puces pour l’automobile, à savoir NXP, Infineon Technologies, Renesas Electronics, Texas Instruments et STMicroelectronics selon Counterpoint, ont tous subi la crise du Covid-10 au premier semestre 2020 dans principalement deux familles de produits dédiés à l'automobile : les microcontrôleurs et les composants électroniques de puissance. Pour les premiers, les fabricants cherchent à faire davantage appel aux fondeurs de puces, dont les capacités de production sont, hélas, pleinement saturées. Pour les composants électroniques de puissance, qui représentent selon Counterpoint en moyenne la moitié de la valeur du contenu en semi-conducteurs des voitures, la solution réside dans la migration de la production des plaquettes de 200 mm à celles de 300 mm. A la clé, un gain de production par plaquette d'un facteur 2,25. C’est-ce que fait déjà Texas Instruments depuis de longues années et essaient de faire maintenant Infineon Technologies et STMicroelectronics. Mais ce mouvement va prendre du temps pour se concrétiser.

C’est pourquoi Brady Wang voit le problème de pénurie se poursuivre jusqu’au troisième trimestre 2021 et celui de la flambée des prix jusqu’en 2022. Les équipementiers et constructeurs automobiles n’ont qu’à patienter.

Contenu en puces 2 à 3 fois plus élevé

Selon le cabinet Omdia, le marché mondial des puces automobiles a dévissé de 36,6 milliards en 2019 à 28,1 milliards de dollars en 2020 à cause de la crise du Covid-19, mais devrait reprendre une croissance composée de 13 % par an dans les années à venir pour atteindre 40,6 milliards de dollars en 2023 tiré par le développement des véhicules électriques et hybrides, dont le contenu en semi-conducteurs est deux à trois fois plus élevé que celui dans les voitures traditionnelles à moteur thermique.

La production mondiale de voitures aurait plongé de 17 % en 2020 à 74,1 millions d'unités selon le cabinet IHS Markit, et les plans actuels de vaccination laissent entrevoir une reprise de 14 % en 2021 à 84,3 millions d'unités.

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