
Cela faisait des mois que les constructeurs européens tempêtaient contre les constructeurs chinois, avec pour chefs de file Luca de Meo, le directeur général de Renault et Carlos Tavares, celui de Stellantis. L'Union européenne, par la voix de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé ce mercredi 13 septembre le lancement d'une vaste enquête sur les subventions accordées par la Chine à son industrie, afin de développer les voitures électriques.
« Les marchés mondiaux sont aujourd'hui inondés de voitures électriques chinoises bon marché, dont le prix est maintenu artificiellement bas par des subventions publiques massives », a fustigé la patronne de l'exécutif européen, dans le discours sur l'état de l'Union européenne, à Strasbourg.
Si, au terme de son enquête, la Commission constate des infractions aux règles commerciales, elle pourrait infliger des droits de douane punitifs aux véhicules chinois, au risque de déclencher une guerre commerciale avec Pékin. Cette annonce a eu pour effet de faire reculer les constructeurs chinois en bourse. BYD clôturait ainsi en baisse de 0,17 %, Xpeng et Nio chutaient respectivement de 2,2 % et 3,64 %.
Force est de constater que les véhicules commercialisés par l'Empire du Milieu sont moins onéreux que ceux produits en Europe - 10.000 euros moins chers environ -, ce qui leur octroie un sérieux avantage sur le marché mondial. Or, les subventions massives vont notamment à l'encontre de l'Organisation mondiale du commerce. L'OMC impose de ne pas établir de discrimination entre leurs partenaires commerciaux.
Une enquête bienvenue côté français
Dans les faits, cette enquête a été largement poussée par les constructeurs français. Ces derniers se plaignent d'une distorsion de concurrence sur le marché à cause de ces subventions. Dans une interview accordée à La Tribune, Luca de Meo, également président de l'Association des constructeurs automobiles européens (ACEA), rappelait que « l'Union européenne doit trouver la façon de se protéger, non pas pour défendre une industrie du passé, mais pour faire décoller l'industrie de demain ». L'association a ainsi salué la décision de l'exécutif européen. En revanche, ni Renault ni Stellantis n'ont fait de commentaires après cette annonce.
Les ministres de l'Economie français et allemand ont, eux aussi salué cette décision européenne, estimant qu'il s'agit de la « bonne attitude », tout en prenant des gants afin d'éviter d'irriter la Chine. Le ministre allemand a rappelé à l'AFP qu'il « ne s'agit pas d'exclure du marché européen des voitures performantes et bon marché, mais de voir s'il y a des subventions cachées, directes ou indirectes, qui représentent un avantage concurrentiel déloyal ».
66 milliards d'incitations fiscales sur trois ans
La Chine a accordé d'importantes subventions à ses constructeurs et équipementiers, notamment, afin d'accélérer la transition vers le véhicule électrique. En juin dernier, le pays a, ainsi, annoncé un ensemble d'incitations fiscales pour les voitures électriques et hybrides, pour un montant total de 520 milliards de yuans (66,16 milliards d'euros), entre 2024 et 2027. Plus concrètement, les véhicules hybrides et électriques seront exemptés de la taxe à l'achat, qui s'élève à environ 3.800 euros par véhicule, en 2024 et 2025.
De facto, les marques automobiles chinoises dépasseront en volume toutes les autres marques, jusqu'à représenter 65% du marché chinois en 2030. Une première historique. Quid du marché européen ? Les constructeurs chinois ont fait une entrée remarquée ces dernières années. Ils étaient même deux fois plus nombreux cette année au salon de l'automobile à Munich qu'il y a deux ans.
Preuve en est, la voiture électrique MG 4 (MG Motor) est la sixième voiture électrique la plus vendue en France. L'Union européenne redoute désormais un scénario similaire à celui qui s'est opéré sur le marché des panneaux solaires. « Nous n'avons pas oublié combien notre industrie solaire avait pâti des pratiques commerciales déloyales de la Chine », a ainsi souligné la présidente de la Commission européenne.
Pour éviter une réponse cinglante de la part de Pékin qui pénaliserait les constructeurs européens, le commissaire au Commerce, Valdis Dombrovskis, a annoncé dans la foulée qu'il se rendrait en Chine la semaine prochaine. Il discutera des modalités d'échanges commerciaux entre les deux puissances.
Le bonus écologique, une subvention française
La France n'est pas en reste. L'Etat a annoncé une évolution du bonus écologique accordé à toutes les voitures électriques en France, en dessous de 47.000 euros. Les 5.000 euros ne seront plus accessibles aux véhicules avec une empreinte carbone élevée. Une autre façon de mettre sur la touche les voitures électriques chinoises produites dans les usines en Chine.
« Nous sommes sur une ligne de crête qui mérite beaucoup de vigilance. La France utilise une petite marge de manœuvre sur l'écologie permise par les règles de l'OMC pour protéger le secteur des véhicules européens. Avec les subventions massives de la Chine en faveur de l'industrie automobile chinoise, nous sommes passés du respect des règles de concurrence équitable à un rapport de force fondé sur une des distorsions de concurrence », explique Elvire Fabry, chercheuse à l'Institut Jacques Delors et en charge de la Géopolitique du commerce.
Bagikan Berita Ini
0 Response to "Automobile : l'Europe lance une enquête sur les subventions chinoises - La Tribune.fr"
Post a Comment