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« Ex chasseuse de têtes, je suis devenue pilote de course automobile » - Les Echos START

« J'ai toujours été très sportive. Handball, volley-ball, basket-ball, football, même la danse classique… J'ai tout testé quand j'étais petite.

Je découvre le karting pendant le secondaire, l'équivalent du 'lycée' en Belgique. A 15 ans, je fais ma première course en monoplace, c'est-à-dire seule dans le véhicule, une espèce de 'mini F1'. Je suis la plus jeune du plateau, où se déroulent le circuit et la compétition, et une des seules femmes. J'attire les journalistes et je passe à la télévision locale.

Pendant mes années lycée, j'ai une vie totalement bipolaire : le week-end je suis sur les circuits, et la semaine j'ai une scolarité tout à fait normale. Cela me permet de garder les pieds sur terre.

Un « bachelier » en marketing

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Même si j'adore ce sport et rêve déjà d'en faire un métier, mes parents me poussent à prendre mes études au sérieux. Car, dans leur jeunesse, c'est ce qu'il leur a manqué. Ce n'est pas un problème pour moi car je ne suis pas mauvaise à l'école.

L'équivalent du bac en poche, je tente une année de sciences politiques et de communication à l'Unif, une université publique à Bruxelles. Rapidement, je me rends compte que ce n'est pas fait pour moi.

L'année d'après, j'intègre une 'haute école' [équivalent belge d'une 'grande école' en France, NDLR] en marketing. Trois ans plus tard, à 23 ans, je sors avec un 'bachelier' [équivalent du 'bachelor' français, NDLR] spécialisé dans le marketing. Je choisis cette spécialité puisque cela me permet, entre autres, de mieux comprendre comment fonctionne le sponsoring automobile.

C'est à la fois 'un plan B' si je n'arrive à vivre de ma passion mais aussi un bagage supplémentaire pour atteindre mon rêve : devenir pilote professionnelle. Pendant ces trois ans, je passe la moitié de mon temps sur les bancs de l'école, l'autre sur les circuits, comme un hobby.

A la sortie de l'école, je cherche un travail pour payer mes factures. Pendant six mois, en 2012, je travaille dans la banque néerlandaise ING. Ce boulot en agence m'apparaît comme trop répétitif. Ce n'est pas fait pour moi. Il me faut un métier plus dynamique.

Au hasard des offres d'emploi, je tombe sur une annonce d'une agence belge de chasseurs de têtes, SThree. Je postule et suis recrutée. J'ai tout à apprendre, je ne connais rien de ce métier qui m'a l'air passionnant.

Des primes qui triplent le salaire

D'abord, la première année, je suis chargée de recruter des profils financiers (comptables, gestionnaires de patrimoine, etc.) pour des petites boîtes qui recrutent. L'enjeu est de « chasser » des salariés en poste pour créer un match avec mes clients, les entreprises.

Ce métier nécessite de la prise d'initiative, du commercial, du relationnel, de l'empathie, un regard complet sur le processus de recrutement d'un candidat que l'on gère de A à Z… Je suis vite à l'aise. Je commence avec un salaire fixe de 1.200 euros net par mois.

Après une année en poste, je me spécialise dans les profils scientifiques pour l'industrie pharmaceutique. Je recrute des profils très qualifiés pour des postes hautement stratégiques (lobbying, réglementation des médicaments, etc.).

Les enjeux du secteur sont énormes, même à mon niveau, j'apprends beaucoup de choses. Mon salaire fixe monte à 2.000 euros net par mois. Et les primes selon le nombre de recrutements parmi mes candidats peuvent le doubler, voire le tripler.

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Recrutée par Lamborghini

Comme c'est un poste selon moi très gratifiant, je reste sur ce segment durant quatre années. Il faut dire que je suis tombée sur des gens très compréhensifs. Pour que je puisse faire mes entraînements et mes courses, ils acceptent beaucoup d'aménagements.

Par exemple, dans ce métier, on appelle souvent les potentiels candidats après leur journée de travail, vers 18 - 19 heures. Moi, quand c'est nécessaire, je peux commencer beaucoup plus tôt, vers 7 heures du matin, pour quitter le boulot vers 16 heures, en milieu d'après-midi.

En 2017, je suis recrutée en tant qu'instructeur de pilotes chez Lamborghini, un prestigieux constructeur automobile. A partir de ce moment-là, combiner les deux devient difficile. En accord avec ma hiérarchie, je passe à mi-temps. Cela dure un an avant que je rende ma démission pour me dédier à l'automobile.

La transition entre salariat et entrepreneuriat se fait en douceur.

Je m'installe alors en tant qu'autoentrepreneuse spécialisée dans l'événementiel, le marketing et la communication sur les circuits automobiles, en plus de mon activité d'instructeur. J'alimente mes réseaux sociaux via mes marques sponsors et travaille pour des entreprises comme TotalEnergies, sponsor historique des 24 heures du Mans. J'arrive à aussi bien gagner ma vie que lorsque j'étais salariée.

« De gros regrets »

Jusqu'à ce qu'arrive la pandémie de Covid-19 ! Tout s'arrête d'un coup… Les circuits automobiles sont les premiers secteurs qui ferment, et les derniers à rouvrir. A ce moment-là, c'est très dur. J'ai de gros regrets de ne plus être salariée, ce qui m'assurerait une situation plus confortable, même si j'ai une aide d'environ 1.200 euros de l'Etat belge pendant cette période.

Au lieu de continuer à broyer du noir, je décide de me former pour me consacrer à ma deuxième passion : les animaux. En 2022, au sortir de la crise, je suis acceptée dans une formation de deux mois de toilettage canin.

Au détour d'une affiche, je vois passer une info : une des pilotes de la 'Iron dames team', une équipe de femmes pilotes de courses, les a quittés, il reste une place vacante. C'est dans une semaine à peine, mais je me fends d'un mail à l'adresse 'contact' de l'équipe… Et continue à toiletter mes chiens.

J'en oublie même que j'ai postulé lorsque mon téléphone portable sonne le soir pour me proposer de rejoindre la team !

Toilettage, écurie et Barcelona

Et là c'est le branle-bas de combat. La course est dans cinq jours et il faut que je me fasse catégoriser par la fédération internationale de l'automobile (FIA) pour pouvoir la courir… En plus, je n'ai pas roulé sur un circuit depuis 2019.

Quatre jours plus tard, je suis apte, je laisse mes chiens et saute dans un avion pour Barcelone, où se déroule le championnat de l'European Le Mans Series (ELMS) sur le circuit Barcelona-Catalunya. J'intègre donc l'écurie 'Iron dames' dont l'engagement pour les femmes dans des sports très majoritairement masculins me correspond.

20

C'est le nombre de pilotes pros (hommes) de F1 dans le monde en 2024.

A peine arrivée, je fais les premiers tests, tout est OK. C'est important car dans cette spécialité, les courses d'endurance (de longue durée - par exemple 24 heures) on est toujours en équipe et on fonctionne en relais. Et le niveau doit être homogène, d'autant que parfois, la vitesse de pointe peut monter à 290 km par heure.

100 % féminin

C'est ainsi que je cours pour la première fois en 2021 les 24 heures du Mans avec les 'Iron Dames' jusqu'à faire les championnats d'Europe et du monde. On finit vice-championnes du monde en 2023 ! Une première historique pour un équipage 100 % féminins.

Depuis quatre ans maintenant, je parcours le monde avec les 'Iron Dames' dont fait aussi partie Doriane Pin, sacrée 'révélation' par la FIA l'année dernière. Tout au long de l'année, on fait environ vingt courses. Cela se passe pendant les week-ends mais on doit être présentes toute la semaine en amont pour la préparation.

Aujourd'hui, j'ai toujours le statut pilote de course amateur dans cette team mais grâce à certains aménagements avec l'équipe et mes sponsors, j'arrive à en vivre correctement (grâce essentiellement aux dédommagements de déplacements, mon activit�é d'instructeur et encore quelques contrats en free-lance). Et surtout, je passe enfin ma vie sur les circuits ! »

À noter

Si vous avez aussi une belle (ou moins belle) histoire à raconter, n'hésitez pas à nous contacter : redaction-start@lesechos.fr

Et pour lire d'autres témoignages inspirants, c'est ICI.

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