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Mais les candidats ne se bousculent pas au portillon. L’ampleur de l’investissement requis pour adapter à des pièces de substitution l’outil industriel ultramoderne laissé par les Coréens et les Européens rend la production sur le sol russe moins avantageuse qu’en Chine. Un handicap que le gouvernement russe tente de compenser en attribuant divers avantages fiscaux et subventions aux acheteurs de véhicules neufs produits localement.
La Russie veut reconstruire une industrie automobile nationale
Un tel contexte explique les conditions posées à l’association entre l’industriel national GAZ (Gorkowski Awtomobilny Sawod) et le groupe chinois Changan Automobile (ou Chang’An). La coentreprise PAL créée par GAZ et Changan a pour but d’entamer d’ici la fin de l’année 2024 l’assemblage d’une voiture chinoise sous la marque russe Volga, d’abord à partir de composants importés de Chine, puis progressivement avec un contenu local russe de plus en plus important.

Les Volga C40, K30 et K40 telles que dévoilées en Russie, le 21 mai 2024. Crédit: Agence TACC
L’annonce de la résurrection de la vieille marque Volga est intervenue le 21 mai dernier, à l’occasion d’une foire industrielle à Nijni-Novgorod — une des principales villes du pays située à 400 kilomètres à l'est de Moscou — en présence du premier ministre Mikhaïl Michoustine. Ce dernier soulignait l’importance du montant, 60 milliards de roubles, qui sera investi pour organiser la production de composants russes dans le complexe industriel GAZ de Nijni-Novgorod, qui assemblait depuis 2010 et jusqu’en 2022 des Volkswagen et des Skoda. L’objectif à terme est d’assurer sur place toutes les opérations, depuis la fonderie et la tôlerie jusqu’à l’assemblage du véhicule fini. Tout un symbole.
Cette résurgence de l’automobile russe est vivement soutenue par les autorités, qui souhaitent réduire le poids des importations chinoises. Avant l’invasion de l’Ukraine et les sanctions occidentales, l’industrie nationale assemblait quelque 1,5 million de véhicules par an. Après être tombée presque à zéro dans la foulée des sanctions, la production devrait remonter à 1,3 million en 2024, selon les prévisions de l’Association of European Business (AEB).
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D’après le cabinet Autostat, près de 94 % des 57 812 voitures neuves importées en Russie au mois d’avril dernier venaient de Chine (contre 3,5 % en 2020). Si Lada (AvtoVAZ, autrefois contrôlé par le Groupe Renault) occupe encore la première place du palmarès des marques les plus vendues, les neuf autres sont aux mains de constructeurs chinois.
Le 3 août 2023, le chef de l’Etat Vladimir Poutine appelait ses fonctionnaires à « ne plus conduire que des voitures nationales », dont la liste se résume aux Lada et aux Moskvitch, bientôt rejointes par les nouvelles Volga. Depuis décembre 2022, les secondes sortent de l’ancienne usine Renault au sud de Moscou, rebaptisée « l’Usine automobile de Moscou ». Mais là encore, la technique et les capitaux chinois sont à l’œuvre. Quand AvtoVAZ collabore avec FAW, la Moskvitch 3 n’est qu’un clone d’un crossover conçu par JAC Motors.
Toutes les Changan ne seront pas assemblées en Russie
Inconnu en Europe, Changan Automobile est bien implanté en Russie. Ce constructeur chinois s’est fait les dents en assemblant des voitures pour le compte de Ford, Volvo et Mazda, avant de lancer ses propres modèles. Certains sont commercialisés depuis quelques années en Russie, mais c’est une berline non importée qui sera assemblée par la coentreprise PAL, puis vendue sous la marque Volga.
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Là encore, la symbolique est forte. Le modèle choisi à dessein est une berline tricorps d’aspect très conventionnel, qui fait écho à la lignée des GAZ Volga de l’ère soviétique. Dans un livre d’entretiens publié peu après son élection à la présidence, Vladimir Poutine avait évoqué avec émotion l’achat de sa première Volga, alors qu’il était encore simple fonctionnaire à Leningrad (aujourd’hui Saint-Pétersbourg).

La Volga M24D (GAZ-24-76) telle que produite entre 1970 et 1979. Crédit: GAZ
A l'Ouest, les films d’espionnage ont popularisé la silhouette menaçante des Volga noires, notamment des modèles GAZ M24 (1967-1992), conduites par des chefs d’entreprise, des fonctionnaires, des militaires et des agents du KGB. Nettement plus logeable qu’une simple Lada (AvtoVAZ 2101/2102), cette berline était aussi la favorite des chauffeurs de taxi. Les cinéphiles se souviendront de cette course-poursuite endiablée dans les rues de Moscou, entre un taxi Volga GAZ-3110 conduit par Matt Damon (Jason Bourne) et Karl Urban (Kirill), l’agent du FSB qui essaie de l’assassiner (« La mort dans la peau », sorti en 2004). Contre toute attente, la Volga sous-motorisée avait vaillamment résisté aux assauts furieux d’un énorme 4x4 Mercedes-Benz Classe G, véritable symbole du capitalisme.
GAZ accède au dernier cri technologique chinois
La Volga C40 dévoilée le 21 mai dernier n’a plus rien à voir avec les Volga de cette époque. Cette berline de segment D, aux dimensions comparables à une DS 9 française, diffère à peine de la Changan Raeton Plus lancée en Chine en 2022 (4,80 mètres de long). Seuls les logos et la calandre ont été modifiés.
A terme, trois modèles conçus par Changan Automobile seront assemblés sur le site de Nijni-Novgorod. Le cabinet Inovev confirme que la berline C40 sera rejointe sur les chaînes de GAZ courant 2025 par la version légèrement russifiée du SUV compact Changan Oshan X5 Plus, vendu sous le nom de Volga K30 (4,50 mètres de long). Un modèle apparu en Chine en 2020, un an avant le grand SUV de segment D Changan Oshan Z6, qui prendra fort logiquement l’appellation de Volga K40 (4,70 m). Les trois GAZ seront animées par un moteur à essence tout ce qu’il y a de plus conventionnel (1,5 litre turbo de 188 chevaux). Paradoxalement, l'artisan de la relance de l'industrie automobile russe sera chinois, du moins dans un premier temps.
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