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Pourquoi les constructeurs automobiles atteindront leurs objectifs CO2 en 2020 - Les Échos

Ils s'y préparent depuis plusieurs années, et le mur se rapproche désormais à grande vitesse. 2020, c'est l'année fatidique pour les constructeurs automobiles, qui devront remplir leurs obligations en matière d'émissions CO2 sous peine de se voir sévèrement sanctionnés par Bruxelles.

Les comptes seront faits à la fin de l'année prochaine. Les ventes de chaque constructeur seront examinées à la loupe, et chacun comparera avec angoisse la moyenne d'émissions CO2 de ses immatriculations avec le niveau attendu par les autorités communautaires. Gare à ceux qui ne seront pas dans les clous !

Régulièrement, des consultants se livrent à de savants calculs théoriques, évoquant des amendes à plusieurs centaines de millions d'euros. Il est vrai que  les constructeurs semblent encore loin de l'objectif moyen (95 grammes de CO2 par kilomètre en norme NEDC) : leurs émissions ont même augmenté l'an dernier, à 120,4 g/km.

En réalité, personne ne peut prétendre connaître le montant de la facture finale. Car les moyens d'atteindre les objectifs sont multiples, et certains ne seront déployés qu'à compter du 1er janvier prochain. PSA a même mis en place il y a environ un an un comité CO2 présidé par le big boss, Carlos Tavares, pour piloter la chose. « Nous avons mis au point une méthode de calcul ultra-précise, qui permet d'évaluer nos émissions à 0,1 g près. Mais nous gardons la recette pour nous ! » explique un porte-parole.

Tous les constructeurs, à part peut-être Daimler-Mercedes , jurent qu'ils respecteront les objectifs en 2020. Passage en revue des cinq grands leviers qu'ils pourront utiliser.

. Vendre des voitures électriques… après le 1er janvier

C'est évidemment le levier le plus efficace : les véhicules les plus vertueux, ceux qui émettent moins de 50 g/km (les voitures 100 % électriques ou hybrides rechargeables) compteront double dans le calcul de la moyenne. « C'est le moyen le moins cher ! » a insisté Herbert Diess, PDG du groupe Volkswagen, au salon de Francfort.

Les constructeurs ont  dépensé des milliards pour mettre au point une offre attractive disponible au début de l'an prochain. Toute la question est maintenant de savoir  quel accueil trouveront les Volkswagen ID3, Peugeot e-208, Opel  Corsa-e , ou Renault Zoe - alors que le véhicule électrique ne représente que moins de 3 % du marché.

« L'analyse des ventes actuelles n'est pas pertinente pour répondre à la question, relève Denis Schemoul, analyste chez IHS. Les seules ventes qui compteront, ce sont celles de 2020 : les constructeurs ont tout intérêt à décaler leurs immatriculations après le 1er janvier. » De fait certains véhicules, comme l'ID3, ou l'e-208, ne seront pas dans les concessions avant l'an prochain − un pari car d'autres modèles, comme la nouvelle Renault Zoe, y sont depuis plusieurs semaines.

La bataille sur les prix a déjà commencé, avec des formules en location longue durée offrant des loyers inférieurs à 200 euros. Sans parler des incitations à la vente de véhicules électriques : Opel a déjà prévu d'en faire dépendre la prime de ses distributeurs.

. Trouver des clients « captifs »

« Si le marché ne décolle pas, les constructeurs pourront toujours activer leur carte bonus numéro un : inciter leurs salariés à choisir des voitures à batteries, grâce à des prix attractifs, souligne l'analyste auto berlinois Matthias Schmidt. Les flottes correspondantes sont énormes ! » Avec ses douze marques (VW, Audi, Seat, Skoda, etc.), le géant Volkswagen compte à lui seul près de 300.000 salariés rien qu'en Allemagne. Il faudra toutefois trouver le bon arbitrage entre des rabais proposés, qui pèseront inévitablement sur la rentabilité, et les amendes évitées.

Dans le même esprit, les flottes de voitures partagées (car-sharing) qui se développent à vitesse grand V pourront aussi aider à passer le cap. «  BMW et Daimler ont déjà une flotte de 20.000 véhicules via leur service ShareNow, qui devrait s'étendre », indique l'analyste. Volkswagen prévoit de lancer une vaste offensive en Europe (Hambourg, Prague, Londres, voire Paris), après avoir déjà déployé 1.500 eGolfs à Berlin. Renault et PSA sont engagés dans une démarche similaire − sur des volumes plus faibles pour l'instant.

. Rendre les moteurs thermiques plus propres

Avec le CO2 en ligne de mire, les constructeurs ont pris soin de concevoir les nouvelles générations de leur gamme moins gourmandes en carburant − donc moins émettrices. Avec son moteur 3 cylindres (qui vient remplacer un 4 cylindres) et une nouvelle boîte de vitesses, la nouvelle Opel Astra affiche des émissions de CO2 inférieures de 21 % à celles du modèle précédent. De quoi améliorer singulièrement les performances d'Opel : l'Astra représente 20 % de ses ventes. Ford ou BMW vont inclure une hybridation de 48 volts à tous leurs véhicules − une technologie permettant de réduire à faibles coûts les émissions de 10 à 15 %.

« Il y a de nombreux moyens d'améliorer les émissions des moteurs conventionnels : l'hybridation ou l'allégement des véhicules, l'utilisation de pneus moins résistants au roulement… », énumère Florent Grelier, auteur d'une étude sur le sujet pour l'ONG Transport & Environnement. « Mais aussi des améliorations pointues sur le moteur lui-même : c'est ce qui a permis à Volkswagen de gagner 6 grammes sur sa nouvelle Golf. »

La réglementation européenne prévoit aussi d'accorder des bonus si le véhicule comporte des « éco-innovations », tels que des phares à LED ou un alternateur plus efficace. Autre exemple, le « coasting », dispositif consistant à réduire la vitesse du moteur, voire à l'éteindre lorsque c'est possible (en descente par exemple). « Ces nouvelles technologies permettent de gagner quelques grammes, mais elles sont encore très peu utilisées : moins de 4 % des immatriculations en 2018 », note Florent Grelier.

. Faire le ménage dans son catalogue

Plus radical, les constructeurs pourront aussi tout simplement retirer des concessions leurs véhicules les plus polluants. Ils n'y auront pas forcément intérêt en 2020 : seuls 95 % des ventes seront prises en compte dans le calcul cette année-là. Mais à partir de 2021, certains n'auront pas le choix.

Plusieurs ont déjà entrepris de faire le ménage dans leur catalogue, notamment lors du passage à l'été 2018 à une nouvelle norme d'homologation. Mercedes a ainsi annoncé la suppression de son plus gros moteur, le V12 biturbo. Opel a aussi abandonné son monospace Zafira, ainsi que ses citadines Adam et Karl, de même que Ford pour sa petite Ka +. « Il est bien trop cher de mettre les petites voitures aux normes ! » confie un constructeur.

Si la décision est facile à prendre pour des modèles qui se vendent mal et qui sont peu rentables, l'arbitrage sera sans doute plus compliqué sur des « cash machines »,  comme les SUV qui font fureur en ce moment − mais comptent parmi les (très) mauvais élèves. Ou encore pour les modèles sportifs style GTI et assimilés, qui apportent peu de ventes mais qui restent un vecteur d'image.

. Pactiser avec un constructeur vertueux

C'est la stratégie non moins radicale adoptée par Fiat Chrysler, qui a cassé sa tirelire pour former un « pool » avec Tesla : le constructeur italo-américain  va payer 1,8 milliard d'euros pour bénéficier des crédits CO2 du fabricant de voitures électriques en Europe, pendant trois ans. Mazda a passé un deal similaire avec Toyota, bien placé grâce à ses voitures hybrides − sans préciser les montants en jeu.

La pratique est acceptée par les autorités européennes, mais elle fait grincer des dents chez les concurrents. « Payer pour avoir le droit de polluer, c'est moyen », souffle l'un d'eux. Pour les plus vertueux, cela peut en revanche représenter une jolie récompense.

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