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L’automobile priée de se mettre la tête dans le guidon - Le Point

« Il faut changer de braquet quand on a le vent dans le dos » : dans la roue d'un rapport du député Guillaume Gouffier-Cha sur le poids économique du vélo, les acteurs du secteur veulent se regrouper et créer une véritable filière, qui pourrait peser jusqu'à 100 000 emplois d'ici à 2050.

Aujourd'hui, le pays de la Petite Reine importe. La centaine de producteurs hexagonaux a fabriqué 660 690 cycles en 2020. Dans le même temps, selon le rapport, les Français ont pris le virage des mobilités douces en important plus de 2,2 millions de vélos.

Conséquence, un manque à gagner pour l'économie au moment où la balance commerciale est au plus mal. Si la filière industrielle représente 4 000 emplois en 2021, elle pourrait monter à 20 000 dans les dix ans, 45 000 à l'horizon 2050, selon M. Gouffier-Cha, qui a remis son rapport au gouvernement cette semaine.

Mais pour y arriver, le secteur doit faire entendre sa sonnette.

« Il faut un comité de filière qui peut discuter avec les pouvoirs publics et les autres filières, automobile et aéronautique notamment, car c'est comme ça que l'on obtient de meilleures pièces et des ruptures technologiques », propose le député du Val-de-Marne, en marge du congrès de la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) de jeudi à samedi à Tours.

Le moment est bon après la pandémie de Covid-19 et un coût de l'énergie au plus haut.

« La crise sanitaire a été formidable pour nous : 50 % de business en plus en deux ans. Il faut changer de braquet quand on a le vent dans le dos, explique Patrick Guinard, PDG du fabricant de roues Velox. Quand il y a une prise de conscience comme ça en France, c'est l'occasion ou jamais de faire les investissements. »

Pièces détachées asiatiques

« Il faut que la production augmente pour ne plus avoir besoin de se fournir ailleurs », espère le dirigeant. L'essentiel de la centaine de pièces qui composent un vélo vient actuellement d'Asie. Un approvisionnement peu optimal, entre pénuries et délais qui peuvent atteindre une dizaine de mois…

« Ça nous empêche de grandir », constate Augustin Ciresa, mécanicien pour les vélos cargos Douze Cycles. « On arrive à trouver, mais on ne fait plus avec ce que l'on veut, on fait avec ce que l'on a. […] Plus aucune entreprise en France ne fait de la fonte d'aluminium pour le vélo. Elles travaillent pour l'aéronautique ou l'automobile. »

Et dans le vélo, la solution, c'est souvent le peloton. « Plutôt que de commander séparément en Asie, il y aurait un intérêt à s'organiser pour produire ensemble », souffle M. Gouffier-Cha.

« On peut avoir le volume pour intéresser l'automobile et l'aéronautique », abonde M. Guinard, citant l'exemple de l'équipementier Valeo, qui s'apprête à lancer un moteur électrique innovant, très attendu par le secteur. Peugeot, qui a toute une histoire sur deux roues, est tout désigné pour renouer vraiment avec ce passé qui concerne également Renault, constructeur avec Giant dans les années 2000 et souvent engagé dans les disciplines sportives, à la différence de Citroën, très marginal.

Mais à l'étranger, les constructeurs sont pro-actifs, notamment en Allemagne avec Porsche, Audi, Mercedes, BMW ou ailleurs avec Skoda, Aston Martin, Lamborghini par exemple, mais aucun encore avec des ambitions à grande échelle. Ils détiennent pourtant le bagage technologique pour endiabler le secteur.

Connaissance des suspensions, du freinage, des moteurs et batteries électriques, maîtrise des matériaux légers et rigides, expertise de la fabrication en série et de la qualité, tout plaide pour que le monde des quatre-roues s'intéresse aux deux-roues, en continuité de service lorsque la voiture est laissée au parking.

Sur un stand du congrès, Arnaud Chéreau pointe du doigt les roues de son vélo cargo connecté.

Démissions françaises

« On ne fabrique pas de freins hydrauliques en France. Si les acteurs commandent tous des freins ensemble, on trouvera des fabricants locaux. On a quand même un tissu industriel et un savoir-faire en France », assure le fondateur de Wello, qui a justement installé son usine près du Mans, haut lieu de l'industrie automobile.

Reste que certaines pièces échapperont au made in France. « On ne refera pas de dérailleurs en France, affirme le patron de Velox. On ne les fera jamais moins chers que Shimano. »

Si toutes les briques se mettent en place dans l'industrie, le secteur doit fédérer aussi plus large, devenir aussi un « objet politique » capable de peser sur les collectivités locales et les aménageurs.

La FUB vise l'été 2022 pour la naissance « comité de filière ». Une structure qui « doit partir de la piste cyclable jusqu'au vélo cargo », selon son président Olivier Schneider, qui cite les géants du BTP Vinci et Colas, « intéressés pour être dans le tour de table ».

« Là où il n'y a pas de piste ou de stationnement, il n'y a pas de développement », concourt M. Gouffier-Cha, qui préconise d'investir 400 millions d'euros par an dans les infrastructures, soit 30 euros par habitant. « Nous avons une histoire forte, mais nous devons passer du Tour de France à la pratique quotidienne. »

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