
Venise ? Murano ? Non, Gargas ! Ce petit village du Luberon, au cœur de la production d'ocres, n'est pas encore célèbre. Mais l'un de ses ressortissants, à vrai dire Marseillais de souche – ce qui est la porte à côté –, s'en occupe activement. Pensez donc, ce sémillant quinquagénaire bouscule la torpeur de la cité provençale qui, mieux que ses rivales italiennes, est devenue le centre du monde de la lustrerie. Dans ses ateliers maintenant relevés et restaurés en de majestueuses nefs aux murs orangés, largement percés d'huisseries métalliques, on distingue sans peine des dizaines de lustres se mirant en un chatoiement féerique dans les vitrages. Et sous les éclairages aux multiples formes, une lumière chaude et chatoyante descend pour quelques semaines sur les carrosseries rutilantes et parfois bariolées des 911 de route ou de course.
On est chez Régis Mathieu, concepteur d'éclairages modernes aussi bien que restaurateur de lustres anciens, souvent majestueux, dont la renommée a désormais fait le tour de la planète. Quand on remet en état les lustres du château de Versailles, bientôt peut-être ceux de Notre-Dame, que l'on réinvente d'après une photo jaunie le lustre de 5 tonnes de l'Opéra de Monaco, que l'on conçoit ceux de l'hôtel de la Marine, place de la Concorde, ou des plus grands palaces en Russie, au Moyen-Orient, aux États-Unis, on n'a plus vraiment de preuves à faire.
Cependant, pour en arriver là, cela n'a pas été une mince affaire. Le maître des lieux, qui a pris la suite de son père dans une usine désaffectée en 2001, a remonté les murs branlants et bâti une réputation. Le dernier atelier a été inauguré la semaine dernière et, pour offrir une mise en scène de choix, Régis Mathieu a fait appel à sa seconde passion – peut-être même la première – la Porsche 911 dont on fêtera les 60 ans en 2023.
Impossible, faute de place, de réunir soixante voitures à présenter sous les lustres maison mais une sélection d'une quarantaine ayant marqué l'Histoire et judicieusement disposées dans les 5 000 mètres carrés d'ateliers majestueux répartis dans la colline pour la plus étonnante des vitrines de cette fin d'année. Si étonnante que Régis Mathieu veut faire de la fabrique un jardin public où l'on pourra venir même la nuit, une production autonome d'électricité permettant d'admirer, nez à la vitrine, les lustres à LED.
Le choix a été simple puisque autour de la seule thématique 911 qu'il connaît sur le bout des doigts, Régis Mathieu n'a eu qu'à écouter ses coups de cœur et faire jouer ses relations. « J'ai pris mon téléphone et j'ai appelé les collectionneurs qui possèdent ou savent où se trouve le modèle que je recherchais. L'idée a rapidement séduit et le plateau est là, avec un exemplaire particulièrement représentatif de chaque époque et parfois fort rare, voire unique », dit-il.
La 911 dans tous ses états
C'est le cas de la 911 S de 1966 sur le capot de laquelle pose Ferry Porsche, une photo qui a fait le tour du monde. Coquetterie, aucune des voitures de Régis Mathieu ou presque ne figure ici, même s'il avoue avoir un penchant pour la première Targa 912, voiture avec laquelle il passe tout l'été, toit en place pour l'ombre et lunette arrière souple démontée. Mais la première de toutes est la 356, un speedster rouge qui fut l'ancêtre de la 911 et dont Régis Mathieu assure qu'il ne se séparera jamais.
Sous les feux magiques du musée de la Lustrerie commence l'exposition, gratuite il faut le souligner, qui suit un parcours chronologique et thématique. Le cœur des porschistes avertis bat pour les RS et on les trouve assemblées, de la mythique RS 2.7 l de 1973 à la toute dernière GT3 RS de 2022 en passant par le Graal, la première 911 R surmontée d'un lustre cubique très moderne. On trouve ensuite l'aile des Speedsters et des Targa, puis celle des Turbos et des sportives avec tout l'éventail des RSR de course.
Mention spéciale, alors qu'aucune Singer ne figure ici : « Ce n'est plus tout à fait une Porsche », la diabolique Ruf CTR de 1987 est bien là, « la seule 911 qui ne soit pas badgée Porsche dans l'exposition ». Cette « Yellow Bird » est hors concours mais toutes les voitures exposées ici le sont, avec pour les non-initiés, un tableau explicatif de ce qui en fait la singularité. Même si, au fil des décennies, la 911 fait de plus en plus le gros dos, change de taille, se gave d'électronique, « c'est toujours au premier coup d'œil une 911. À savoir tout un univers dont on sait, dès que l'on s'installe à son volant, qu'on est à la maison ».
« Lumières sur 60 ans de Porsche 911 » chez Mathieu Lustrerie, 432 route de Croagnes à Gargas (84), du 16 décembre 2022 au 22 janvier 2023. Tous les jours de 17 h 00 à 21 h 00 sauf les 24 et 31 décembre, Entrée gratuite.
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