La Suzuki Lapin est une petite citadine disponible uniquement au Japon et qui a été renouvelée en 2023 avec un look rétro. Ses performances sont modestes, mais sa conception est astucieuse et son ambiance vintage délicieuse. Aurait-elle sa place chez nous face à une Renault Twingo ?
Par MaxK
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Prix, fiche technique et avis : retrouvez toutes nos infos dans cet essai de la Suzuki Lapin LC X.
Clément Choulot
Les Japonais font parfois preuve d’une francophilie surprenante, utilisant des mots français « qui font chic » dans nombre d’enseignes, slogans et autres vêtements imprimés. Au point que le terme « franponais » est désormais consacré pour désigner leur usage quand il est maladroit. L’automobile n’échappe pas à cette tendance. En marge du Salon de Tokyo 2023, l’évocation d’un modèle local n’a pas manqué de nous faire dresser l’oreille, et même les deux : la Suzuki Lapin.
Conçue comme une évolution de la précédente génération qui datait de 2015 et identifiée par le suffixe LC, la nouvelle Lapin a rejoint le catalogue japonais de Suzuki en 2023. Cette citadine 5 portes, à la silhouette bicorps plutôt cubique, mise sur ses feux ronds et sur son charme néo-rétro pour séduire.
Keijidosha, kézako ?
Vue d’ici, la Suzuki Lapin n’a pas que son nom pour susciter la curiosité. Il s’agit d’une kei car ou keijidosha. Introduit en 1949, ce segment réglementé propre à l’Archipel, né pour développer l’industrie automobile avec des petites voitures abordables, répond aussi à la problématique d’un espace densément occupé. À ce titre, les kei cars bénéficient d’une fiscalité avantageuse. Au fil des décennies, les caractéristiques imposées à ces autos ont évolué pour les rendre plus accueillantes et performantes, mais ces règles demeurent très strictes.
Depuis 1998, une kei car doit mesurer au maximum 3,40 m de long, 1,48 m de large et 2 m de haut. Son moteur ne doit pas excéder 660 cm³ de cylindrée (s’il est thermique), et il ne peut délivrer plus de 64 ch. Seule une poignée de kei cars ont été commercialisées en Europe, parmi lesquelles la Suzuki Wagon R et la Daihatsu Copen des années 1990 et 2000. Au premier abord, ces voitures peuvent laisser augurer des prestations bas de gamme. Ce serait ignorer qu'à la faveur d’une réglementation pérenne les constructeurs ont optimisé la formule génération après génération. Suzuki, qui a vendu plus de 25 millions de kei cars depuis sa Suzulight de 1955, est un spécialiste de ce segment. Notre Lapin rose en est un parfait exemple.
Au volant de la Suzuki Lapin
Affichant la longueur et la largeur maximales autorisées, la Lapin y associe une hauteur de 1,53 m, pour une garde au toit de 1,24 m. Combinées à un pare-brise peu incliné et à de grandes surfaces vitrées, ces dimensions offrent une étonnante sensation d’espace à bord. La prise en main y gagne en sérénité. Un atout bienvenu pour s’habituer au volant à droite et surtout pour circuler « du mauvais côté » en déchiffrant tant bien que mal la signalisation routière, puisque notre essai a lieu au Japon. C'est une première pour votre serviteur, aussi concentré que s’il s’agissait de mener une supercar sur un circuit à 300 km/h !
Dès les premiers tours de roue, la légèreté du véhicule se fait agréablement sentir. Les 52 ch du trois-cylindres essence emmènent sans difficulté les 680 kg annoncés à des allures urbaines. La puissance est transmise via une boîte CVT couplée aux roues avant et qui se fait oublier en conduite coulée. La masse réduite facilite aussi le travail de la suspension (MacPherson à l’avant, barre de torsion à l’arrière) et des freins (disques à l’avant, tambours à l’arrière).
Confortable sans paraître déconnectée de la route, notre voiture chaussée en 14 pouces prend un roulis modéré et sait s’arrêter rapidement. Dommage que la direction soit même un peu trop légère, du fait d’une assistance excessive au point mort trop large. Elle a néanmoins le mérite de simplifier les manœuvres, déjà aidées par un rayon de braquage réduit. Le principal défaut de la Lapin à la conduite, c’est sa transmission. Idéale sur un filet de gaz, celle-ci peine à aller chercher le peu de puissance disponible lorsqu’il s’agit d’accélérer franchement, puis la transmet au sol avec une latence certaine. C’est hélas la seule boîte de vitesses proposée pour cette Suzuki qui, soulignons-le, est aussi disponible avec quatre roues motrices. La route ou l’autoroute s’aborde sans crainte, mais la Lapin a été clairement mise au point pour la ville.
Notre version haut de gamme badgée X et bardée d’options s’y montre d’autant plus à l’aise qu’elle dispose de caméras à 360°, de radars de stationnement, d’un GPS, d’une aide au démarrage en côte ou encore d’un système de freinage d’urgence autonome. Citons également la climatisation automatique, la connectivité Bluetooth et USB, le système audio à six haut-parleurs, ainsi que les sièges chauffants. Autant d’équipements de confort appréciables dans la jungle urbaine. Notre parcours essentiellement citadin ne nous permettant pas de déterminer une consommation mixte réelle, on citera avec réserve celle de la fiche technique, à savoir 3,8 l/100 km pour des rejets de CO2 de 89 g/km. Là encore, la légèreté a ses vertus. Elle induit cependant une dotation en sécurité passive relativement limitée ne comportant par exemple que deux airbags, à l’avant. La précédente Lapin avait néanmoins reçu 4 étoiles sur 5 aux crash tests de l'organisme japonais JNCAP en 2015.
À bord de la Suzuki Lapin
Avec ses garnitures beiges jusqu’au ciel de toit, ses inserts façon bois et sa sellerie mêlant tissu à carreaux et similicuir dans les tons bruns, l’habitacle de notre Lapin d’essai distille une ambiance vintage qui rend l'auto particulièrement accueillante. Il en va de même pour le grand compteur rond faisant office de combiné d’instrumentation. L’écran central tactile de 7 pouces paraît un peu rapporté, comme posé sur la planche de bord, sans toutefois nuire trop à l’harmonie esthétique. En revanche, le gros sélecteur de transmission qui se trouve juste en dessous ainsi que les Commodo au volant paraissent datés.
Les plastiques durs de la console centrale tranchent avec les autres revêtements, plus cossus, de notre finition X. Pour autant, l’assemblage ne souffre d’aucun défaut majeur apparent. L’ergonomie des commandes est correcte grâce notamment aux boutons à poussoirs dédiés à la climatisation comme au volume audio. Les rangements sont nombreux et pratiques, à l'image des deux tiroirs situés au-dessus de la boîte à gants (l'un pouvant faire office de porte-gobelet) ou des crochets pour sac que l'on trouve à chaque rang.
Les sièges se révèlent confortables, et ceux du premier rang forment une banquette avec accoudoir central relevable ; une disposition que ne renierait pas Citroën. Quant aux deux places arrière, très reculées, elles distillent un espace aux jambes particulièrement – voire inutilement – généreux. Le volume du coffre en pâtit et se révèle très restreint, même pour une petite citadine. Heureusement, la banquette arrière est rabattable en deux parties. En outre, le design du hayon et son angle d’ouverture obligent les grands gabarits à baisser la tête pour accéder à l’espace de chargement. Mais cette disposition intérieure cache la botte secrète de notre lapin sur roues. Les dossiers des sièges avant ont suffisamment de place pour être entièrement inclinés vers l’arrière, jusqu’à joindre les assises de la seconde rangée, et permettre de s’allonger.
Deux personnes mesurant jusqu’à 1,70 m peuvent confortablement s’installer ainsi, voire celles de 1,80 m en logeant leurs pieds entre les assises avant et la planche de bord. Les reliefs de ce couchage nuisent au confort, mais on a vite fait d’imaginer voyager avec un surmatelas plié dans le coffre pour compenser. D’autres voitures proposent ce type de modularité, mais rarement dans un tel gabarit, même si la première Renault Twingo jouait déjà cette carte. On en regrette d’autant plus l’absence de banquette arrière coulissante (la Twingo 1 en avait une), car cela aurait évité de limiter à ce point le coffre. Ainsi, la Lapin aurait été une véritable voiture à tout faire au format poche. Vous avez dit « voiture à vivre » ?
Prix et concurrence
Produite à Kosai (Japon) et autrefois membre de la famille Alto, la Lapin évolue désormais indépendamment, même si elle affiche toujours symboliquement le nom de sa matrice sur un coin de sa lunette arrière. Au centre de sa calandre, ce n’est pas le logo dela marque qui trône mais bien celui du modèle, silhouette de son animal totem. Le segment des kei cars est férocement concurrentiel au Japon. Il en existe de plusieurs types, des minispaces aux utilitaires en passant par des sportives. Mais, par leur style et leurs proportions, les Honda N-One et Daihatsu Boon semblent bien être les rivales les plus directes de la Lapin.
Cette dernière est la moins chère des trois, coûtant l’équivalent de 8 200 € en entrée de gamme. Comptez environ 10 000 € pour notre modèle d’essai tout équipé. Si la Lapin devait être proposée en France, elle serait nettement plus onéreuse compte tenu des frais d’importation, des taxes et du rapport yen/euro notamment. Elle risquerait aussi de marcher sur les plates-bandes de l’Ignis, qui débute à 16 890 € en motorisation micro-hybride de 83 ch et offre des spécifications répondant aux attentes du marché européen avec son 5/5 décroché en 2016 au test Euro NCAP grâce à son pack de sécurité optionnel. Difficile cependant de ne pas voir en la Lapin une rivale pertinente de la Fiat Panda (un autre animal emblématique de l’Asie) ou de la Renault Twingo sur le segment A. Or celui-ci s'éteint… De quoi écarter un peu plus la possibilité de voir débarquer des kei cars en nombre chez nous. Quoique.
Des kei cars électriques en Europe ?
L’électrification du marché pourrait ouvrir une brèche pour les keijidosha sur le Vieux Continent, car elle rebat les cartes du rapport coût/prix des voitures et ouvre un nouveau marché à conquérir. Nissan vient de lancer au Japon la Sakura, une kei car électrique dont le prix équivaut à moins de 16 000 € en entrée de gamme. Alors qu’une Dacia Spring produite en Chine s'affiche à 20 800 € en France minimum et que les constructeurs européens cherchent à proposer des citadines à batteries moins « low cost » entre 20 000 et 25 000 € d’ici au milieu de la décennie, une Sakura dans ces prix-là ne ferait pas tache. Justement, Suzuki a annoncé pour l’Europe, avec l’illustration d’une silhouette, une voiture électrique ressemblant fort à une nouvelle Wagon R.
Bilan essai Suzuki Lapin
- Exotique de prime abord, la Suzuki Lapin révèle vite les qualités d’une citadine craquante et astucieuse qui serait aussi appréciée en Europe qu’elle l'est au Japon. Son moteur (type R06A) est utilisé dans d’autres modèles en version turbocompressée, qui développe une puissance certes modeste de 64 ch mais un couple de 96 Nm disponible à mi-régime. L'ensemble permet de s’affranchir du 0 à 50 km/h avec un tonus certain et offre un meilleur agrément hors des villes. Si elle était munie de ce turbo, d'une transmission plus réactive et d'une banquette coulissante, la Lapin aurait de sérieux atouts à faire valoir de ce côté-ci du monde. Hélas, rien de tel n’est prévu…
On aime
- L'habitabilité
- La légèreté
- Le style rétro
On regrette
- La transmission lente
- Le coffre trop réduit
- L'indisponibilité du modèle en France
Fiche technique Suzuki Lapin LC X | |
Dimensions et poids | |
Longueur | 3,40 m |
Largeur sans rétroviseurs | 1,48 m |
Hauteur | 1,53 m |
Empattement | 2,46 m |
Volume du coffre | nc |
Capacité du réservoir | 27 l |
Pneus sur modèle d'essai | 155/65 R14 |
Poids à vide | 680 kg |
Moteur et performances | |
Type de moteur | 3 cylindres en ligne atmosphérique |
Cylindrée | 658 cm3 |
Puissance | 52 ch à 6 500 tr/min |
Couple | 60 Nm à 4 000 tr/min |
Transmission | aux roues avant |
Boîte de vitesses | CVT |
0 à 100 km/h | nc |
Vitesse maximale | 140 km/h |
Consommation - CO2 | |
Mixte WLTP | 3,8 l/100 km |
Rejets de CO2 | 89 g/km |
Pays de production | Japon |
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