Interview. La Mancelle est l'une des premières automobiles : Michel Bollée raconte son histoire - actu.fr

Par Maxime Davoust Publié le 12 mai 2024 à 10h16

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Déjà auteur d’un livre sur ses aïeux (« Les Bollée sont dans la course »), Michel Bollée s’intéresse cette fois à l’une des créations de cette famille d’inventeurs, « La Mancelle », et raconte « les tribulations d’Amédée Bollée père et de Léon Le Cordier, du Mans à Berlin (1878-1884) ».

Actu Le Mans : Vous aviez déjà écrit sur l’Obéissante. C’est un peu la suite ?

Michel Bollée : « En 2023, j’avais sorti pour le compte de l’association Patrimoine Bollée un petit livret unique consacré à l’Obéissante. C’était pour marque le 150e anniversaire de ce véhicule. J’ai voulu passé au deuxième véhicule de manière beaucoup plus étoffé en développant surtout sur les difficultés industrielles et économiques de l’époque pour des précurseurs, qu’ils soient aussi bien un ingénieur qui voulait développer un système de transport public et de marchandises, qu’un industriel qui cherchait également à développer une invention. »

Sur cette photographie de 1873, la famille Bollée dans L’Obéissante sur une route de campagne. ©Gustave Cosson / Archives départementales de la Sarthe

ALM : Quel était le principe de la Mancelle ?

MB : « C’était une voiture qui a été inspirée du modèle de l’Obéissante. Celle-ci a été construite à partir de 1872 et elle est sortie officiellement à partir de 1873, avec un voyage à Paris en 1875. Lorsque la Mancelle est sortie en 1878, il n’y avait aucune voiture qui circulait sur les routes en France. Amédée Bollée (père) voulait construire un véhicule plus léger, plus maniable que l’Obéissante qui était un engin assez haut et qui pesait 4,2 tonnes. Avec la Mancelle, de 2,2 tonnes, il a repris le système de roues indépendantes. »

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ALM : Quel est le point de départ de cette aventure ?

MB : « Lors de l’exposition universelle de 1878 à Paris, c’est là que Amédée Bollée a présenté la Mancelle avec l’Obéissante. Il a fait la rencontre de l’ingénieur Léon Le Cordier qui avait l’idée de créer un réseau de transport routier de véhicules à vapeur en France pour les marchandises et les passagers. Il avait été très impressionné par le voyage de l’Obéissante à Paris en 1875. (…) Malheureusement en France, il n’a reçu que des réponses très polies… Le Cordier s’est démené, il est allé voir les militaires, ils ont fait des essais au Mans avec des véhicules à vapeur. Parmi les officiels de l’Armée, il y avait des ingénieurs allemands. »

« La Mancelle n’a pas été construite en France »

MB : « Suite à des montages juridiques un peu acrobatiques, totalement étrangers à Amédée Bollée qui était, avant tout, un inventeur… La Mancelle n’a pas été construite en France, personne ne s’y intéressait. Sur la base du modèle et des brevets d’Amédée Bollée, 14 voitures en février 1881 étaient en construction. Il y avait tout un délai avant que les clients ne paient les véhicules. À un moment, Amédée Bollée s’est quasiment retrouvé au bord de la faillite. Et il y avait des observateurs qui voyaient d’un très mauvais œil qu’un industriel français vende à des Allemands. »

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« Première fois que des automobiles ont été produites en série »

L’un des rares exemplaires de la Mancelle, visible au musée du château de Compiègne. ©Pantoine/CC/Wikipedia

MB : « Même si les voitures étaient terminées et vendues, elles n’ont pas été payées. Ça a été la fin d’un rêve allemand et la fin d’un rêve industriel d’une production en série de véhicules sous brevet Bollée. La compagnie allemande Wöhlert a cessé son activité, elle a été liquidée en 1884. C’est quand même une étape dans l’histoire de la construction en série de véhicules. C’est la première fois que des automobiles ont été produites en série, sur la base de systèmes Amédée Bollée. »

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« Un temps considérable et des sommes trop importantes »

MB : « Il a mis du temps à rétablir sa situation financière… Il a été aidé en cela par l’activité de sa fonderie de cloches au Mans. Il a fait quelques autres voitures à vapeur mais très vite il a arrêté. Il y a consacré un temps considérable et des sommes trop importantes. Il avait compris que de toute façon l’avenir de l’automobile appartenait au moteur « tonnant », c’est-à-dire au moteur à essence. Son fils ainé, qui s’appelait comme lui Amédée, qui était mon arrière-grand-père, s’est mis à construire quelques moteurs à essence. »

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ALM : La suite de l’histoire est racontée dans « Les Bollée dans la course »… Y a-t-il encore des choses à écrire sur cette saga ?

MB : « La famille Bollée est connue surtout par ces inventions qui touchent à l’automobile. Ernest Sylvain qui s’est installé au Mans en 1842 était fondeur de cloches. C’était un précurseur dans différents domaines. Il s’est mis à fabriquer des béliers hydrauliques pour équiper des domaines où il fallait aller chercher l’eau. Et il a créé des éoliennes. Et puis Amédée Bollée (fils) avait un fils, Léon. Il avait fait une machine à calculer pour aider son père… »

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Des traces encore visibles au Mans

Au Mans, il reste encore des traces de leurs multiples créations, dont une éolienne, visible à la Maison de l’eau, sur le site de l’Arche de la nature.

La fameuse Mancelle (doté d’un moteur électrique) a été reproduite par une association et est régulièrement montrée au public.
L’avenue Bollée, au bout de laquelle était installée l’usine familiale, fait l’actualité pour une tout autre raison : c’est l’un des axes des futures Chronolignes, des voies pour… des bus à hydrogène !

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Une éolienne Bollée visible à la Maison de l’eau, au Mans. ©Maxime DAVOUST/Actu Le Mans

« La Mancelle – Les tribulations d’Amédée Bollée père et de Léon Le Cordier » par Michel Bollée, Editions du Borrego. Prix : 22 €.

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